L’une des jeunes filles s’anime en confiant avoir déjà entendu parler de ces appareils photographiques qui fonctionnaient avec un film. « Les images, l’une après l’autre, étaient très petites », note-t-elle pendant que ses mains déroulent une pellicule imaginaire. À une époque dominée par les téléphones portables où (presque) tout le monde est à un toucher près d’une photo instantanée, le contact avec la réalité analogique pique la curiosité.
Faire découvrir à des adolescents le monde de la photographie (au-delà du numérique), c’est l’un des objectifs des ateliers organisés cet été par Youssef Shoufan au Catalyseur d’imaginaires urbains. Mais pas le principal. « Le plus important, avant tout, c’est la rencontre humaine », dit-il.
Youssef est photographe et créateur multimédia, en plus d’être cofondateur de La maison de la Syrie, organisme sans but lucratif qui travaille depuis 2014 à la promotion du patrimoine et de la culture syrienne. Né à Damas, il est arrivé à Montréal à l’âge de sept ans, en 1994. Donc, il connaît bien ce que signifie le mélange culturel, ce qu’il veut encourager dans ces ateliers ouverts aux jeunes, d’origine syrienne ou autre, âgés de 13 à 17 ans.
« Parce que je crois à l’importance du métissage, et surtout d’un métissage qui se fait dans la créativité. À cet âge-là, c’est important de voir le monde, et de le voir aussi à travers les yeux des autres personnes », ajoute-t-il.
Ce carrefour de cultures était bien réel dès les premières rencontres : les participants étaient d’origine syrienne (habitant ici depuis des années ou récemment arrivés avec le statut de réfugié), vietnamienne, antillaise, anglaise et, bien sûr, québécoise. Youssef leur a montré plusieurs appareils photographiques différents et leur a appris quelques éléments techniques concernant le fonctionnement du diaphragme, l’ouverture, la durée de l’exposition, le cadrage.
Comme l’assimilation de toute théorie demande la pratique, le groupe a été mis au défi. Munis ou bien d’une simple caméra jetable, ou bien de caméras numériques – et même d’un appareil capable de révéler les photos sur le coup, de style Polaroïd – les participants ont arpenté le Catalyseur en quête de paysages, de gros plans et de portraits.
« L’intéressant de ce lieu ici, c’est justement qu’il est un chantier. Il n’y a pas de prétention, ce n’est pas une institution rigide, tu sens automatiquement la possibilité de créer de choses. Quand on arrive et que l’on voit les conteneurs, les potagers, le Mont Réel, c’est comme si on avait le droit de faire ce qu’on veut ! », affirme Youssef.
Lorsque les jeunes ont été encouragés à partager leurs impressions sur l’expérience et à expliquer ce qui les avait motivés à participer à l’atelier, le sentiment de liberté a été souligné. Liberté de s’exprimer, de (se) découvrir, d’être soi-même. Tout cela, dans un environnement sain, sans jugements, ouvert aux idées et à l’expérimentation à travers la photographie.
« Quand une jeune dit qu’elle était heureuse de participer parce qu’elle était acceptée comme elle est, elle n’a pas expliqué ce qu’elle est ni ce qu’on a fait pour l’accepter, mais c’est arrivé. Et ça, pour moi, c’est aussi une forme de victoire », résume Youssef.
Les ateliers seront encore offerts pendant les deux prochaines semaines. Chaque jeudi et dimanche, à 14h, au Catalyseur (à l’angle des avenues Atlantic et Durocher, juste derrière l’édifice 400 Atlantic – en cas de doute, cherchez les conteneurs !). Le 17 août, une exposition sera organisée sur place avec les photos prises par les participants.
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